Casse-tête

Casse-tête était épuisé. Il n’en finissait pas de réfléchir. Il aurait bien aimé se reposer, mais c’était réellement impossible pour lui : tout était prétexte à « couper les cheveux en quatre ». Il déplorait de ne pouvoir mener une vie insouciante et calme. Il s’énervait dès qu’il ne trouvait pas de solution aux sempiternelles questions qui envahissaient son cerveau et l’empêchaient de résoudre des problèmes compliqués, mais, hélas, parfois très simples également.

Casse-tête méritait bien son nom et se sentait seul. Bien sûr il se posait la question : comment ne pas avoir un esprit aussi « tordu », comment regarder le monde comme il existe au lieu de vouloir le changer ? Mais comme il cherchait inlassablement à le transformer, ou l’améliorer, il ne pouvait en accepter l’organisation. De plus, comme les idées qu’il avait ne le satisfaisaient jamais, il continuait à se retourner le cerveau inutilement. Personne ne pouvait l’aider à ne plus se casser la tête, c’était devenu une évidence pour lui. Il méditait sur ce sujet, lorsqu’il aperçut un enfant qui venait vers lui. Surpris, il oublia un instant de penser et entendit une petite voix lui demander :

- Bonjour, qui es-tu ? Tu en fais une drôle de tête !

- Bonjour, je ne fais pas une drôle de tête, c’est ma tête habituelle.

- Ah ? C’est curieux ! Tu as l’ai bien fatigué ! Rétorqua l’enfant.

- Oui, c’est exact, tu as bien compris : je suis épuisé de réfléchir tout le temps.

- Alors tu n’as qu’une seule chose à faire : repose-toi et laisse le temps passer, de sorte que tu ne penseras plus. C’est ce que je fais quand je suis à l’école et que la maîtresse nous donne des problèmes trop compliqués à résoudre : je regarde dehors par la fenêtre et je rêve que je me promène au milieu des nuages. C’est très agréable et efficace, car je ne m’ennuie pas et surtout je ne me fatigue pas comme mes camarades de classe qui veulent avoir des bonnes notes, se faire remarquer pas l’institutrice et être récompensés.

- Mais tu ne te fais pas gronder ? Lui demanda Casse-tête, très surpris et même impressionné par l’attitude de l’enfant.

- Non, la maîtresse ne le voit pas : je le fais discrètement. Et je m’arrange de regarder sur mon voisin, qui est le meilleur de la classe, pour recopier ce qu’il a trouvé. Donc j’ai toujours de bonnes notes sans jamais me fatiguer. Personne ne s’en rend compte, ni la maîtresse, ni lui, ni mes parents.

- Tu as dû beaucoup chercher pour arriver à une telle stratégie ! S’exclama Casse-tête de plus en plus impressionné.

- Oui, au début, mais maintenant que ma technique est au top, je l’applique sans me poser de question ! Si tu veux un conseil : tu devrais faire comme moi : cherche une méthode efficace pour ne plus te casser la tête et te reposer le plus possible. La vie serait bien plus facile pour toi ! Je te laisse, car je vais à l’école et je ne veux pas arriver en retard. Cela fait partie de mon plan : être toujours à l’heure pour ne pas me faire remarquer et pouvoir copier sur mon voisin. Je ne veux surtout pas éveiller le moindre soupçon. Je te laisse et pense à ce que je t’ai dit pour aller bien !

L’enfant continua sa route.

 Casse-tête chercha une infinité de stratégies, mais à ce jour il n’a pas encore trouvé toutes les solutions répondant aux multiples problèmes qui jalonnent sa vie. Et le pire de cette histoire, c’est que depuis qu’il avait rencontré cet enfant, il était de plus en plus fatigué. Il voulut le retrouver, mais hélas il ne le revit jamais.

 

Danièle Berry, 9 décembre 2023

Date de dernière mise à jour : 24/12/2023

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Commentaires

  • Berry Michel
    • 1. Berry Michel Le 24/12/2023
    Très beau conte sur le problème des casse-têtes (j'en connais...). Heureusement le "truc" de l'enfant qui copie n'a pas marché : peut-on toujours trouver dans sa vie un "bon élève" sur lequel il suffit de copier ? Pas très porteur en tout cas comme projet de vie

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